Le tango est chargé de mythes et d’icônes (séduction, postures, vêtement, rituel). C’est
un théâtre, c’est à la fois une danse et une musique. Dans ses va et vient de la rue au
salon, c’est à la fois une pratique populaire et sociale, mais aussi un art (la scène
nationale et la culture underground)… C’est encore une manière traditionnelle et
branchée de rejouer le couple et une pratique qui se mondialise.
La fonction matrimoniale du bal n’est plus aussi forte. Dans le divertissement et la
pratique artistique, les archétypes demeurent, mais ils sont rejoués et pervertis. Le
tango fait danser le couple d’aujourd’hui : l’altérité des genres, la sensualité, le célibat,
la séduction, le métissage, l’amour et le désamour. Dans leur histoire, les couples
viennent renouveler l’approche de l’autre sexe, se tiennent à distance de toute relation
sexuelle, mais travaillent tous les signes du sentiment amoureux. Si les schémas de la
domination masculine ont la peau dure, ils sont partiellement battus en brèche par la
nature du public féminin qui est majoritairement issu de catégories
socioprofessionnelles supérieures, et doté d'une évidente autonomie. Renégociés et
pervertis, ces archétypes imprègnent la sociabilité du bal. À la périphérie du sentiment
amoureux, ils matérialisent corporellement une manière de marcher ensemble.
Christophe Apprill est danseur et sociologue. Son regard sur le tango est donc une
critique amoureuse de ces rituels et des raisons pour lesquelles il plaît tant à la société
d’aujourd’hui : un désir de tradition, d’émancipation, une recherche du contact corporel,
une nouvelle donne du couple, une culture mondiale à la quête de ses origines et de
son exotisme pittoresque... Son analyse s’appuie sur des enquêtes parmi les milieux de
danseurs et de musiciens. Le texte comprend de nombreux témoignages. En fin
d’ouvrage : une bibliographie, les associations et les lieux du tango en France, un
glossaire, un index.
Le livre est ponctué de gravures à l’encre de Chine de Delphine Grenier.
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